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LE FIGARO

Karl-Heinz Dellwo : ''On ne peut pas se dérober devant l'histoire''
Propos recueillis par PIERRE BOCEV
14/10/2007 | Mise à jour : 13:29

http://www.lefigaro.fr/international/2007/09/05/01003-20070905ARTFIG90177-karl_heinz_dellwo_on_ne_peut_pas_se_derober_devant_l_histoire.php

Karl-Heinz DELLWO. - Beaucoup de gens estiment que nous nous en sommes trop bien tirés. On ne parle plus du conflit politique de l'époque, mais de repentir et de culpabilité. Plus personne ne se souvient que 68 était marqué par l'idée d'un nouveau départ. Que ma génération n'a pas jugé possible d'envisager de s'intégrer dans cet État avec l'ancienne élite nazie parée d'habits neufs. Tout ce qu'ils ont regretté, eux, c'est d'avoir perdu.

Fallait-il les combattre les armes à la main ?

Le climat politique y correspondait dans le monde entier. Partout où il a été question de libération, c'était dans une logique anti-impérialiste et de manière armée. En France, par exemple, il y a eu Régis Debray ou encore Jean-Paul Sartre qui a jugé légitime le recours à la violence. Les affrontements les plus durs entre la gauche et l'État ont eu lieu dans les pays où le fascisme a joué un rôle majeur : RFA, Italie, Japon.

Une libération doit-elle dépendre d'un repentir ?

Ce que nous avons tous accepté, c'est que la libération allait impliquer la renonciation au retour à la lutte armée. Je l'ai moi-même déclaré, au nom de tous, en 1993. Mais on ne peut pas exiger le repentir quand on est dans la position du plus fort, ce n'est pas légitime. À l'inverse, chacun doit porter un regard critique sur son histoire. Bien des choses ont mal tourné, on peut et on doit le regretter. Il faut être ouvert à cette discussion. Nombre de camarades l'ont refusée et je les ai critiqués pour cela. On ne peut pas se dérober devant l'histoire.

Qu'est-ce que cela signifie dans votre cas ?

Je regrette beaucoup des erreurs qui ont été commises. À titre non pas d'excuse, mais d'explication, je voudrais dire une chose : nous avions l'impression, après la mort de Holger Meins (*) que la classe dirigeante n'avait plus aucun scrupule et qu'il fallait la faire payer.

La RAF a-t-elle changé l'Allemagne ?

Les tentatives d'assumer le passé nazi n'ont commencé pour de bon qu'après 1976. Après 1977 et « l'automne allemand », il y a eu la création du journal de gauche Taz et la naissance des « listes multicolores » qui allaient aboutir au parti des Verts. Après l'échec de la « Rote Armee Fraktion », beaucoup dans ces milieux ont accepté de rejoindre les institutions politiques. On a vu que la révolution n'allait rien donner, alors on a voulu faire pour le mieux. Oui, la RAF a changé l'Allemagne.


* Membre de la RAF, mort en prison en 1974 après trois grèves de la faim.